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apnea walks
marche en apnée

Un peu de contexte

Les marches ont apnée sont un exercice largement sous-estimé et pourtant à la portée de chaque apnéiste, pour entraîner sa tolérance au co2 dans un environnement externe à une piscine ou à la mer. 

Principes de base

Il est primordial de créer les conditions idéales pour ces exercices. Si la météo ne joue pas un grand rôle, ce que vous utilisez pour cet exercice peut vous permettre de passer d’un sensation de « tolérable » à « confortable ». Si vous vous appropriez cet exercice, vous y reviendrez plus souvent.

Il s’agit pour moi de vous donner des pistes mais comme toujours en apnée, il vous faudra trouver ce qui vous convient à vous. Je vous fait juste la proposition idéale – selon moi – et je vous dit pourquoi je la trouve idéale. Si on parle « juste » de marcher en retenant son souffle, vous allez voir, il est possible de faire bien plus que ça.

Pourquoi?

Ben oui, pourquoi marcher en apnée? Si vous êtes un apnéiste « standard » (donc ni un athlète, ni un hyperlaxe, ni un gagnant de la loterie génétique), vous remarquerez que vos muscules consomment une certaine quantité d’énergie. Quantité qui augmente quand les muscules sont mobilisés. Cette « consommation » peut être réduire en habituant le corps à tolérer un haut de niveau de co2, tout en étant en mouvement, avec un rythme cardiaque élevé. C’est un travail d’endurance et cela touche d’ailleurs toutes les disciplines de l’apnée (sauf la STA et le no-limit, évidemment) La marche en apnée permet de travailler justement cela. Petit à petit.

Sortir de sa zone de confort

Rester dans votre zone de confort ne fera jamais de vous un meilleur apnéiste. Il s’agit ici de profiter de l’occasion d’aller plus loin dans les sensations, et d’ouvrir la porte de l’inconfort. On ne parle pas de douleurs, mais bien d’inconfort. Peut-être même d’inconfort appuyé. Testez, explorez! Aussi, de l’autre côté, gardez en tête que si vous faites vos tables et que vous les survolez, alors elles ne sont certainement pas bien adaptées.

La bonne durée, et la bonne apnée.

Le temps minimum pour cet exercice devrait être d’au moins 20 minutes. Vous pourrez toujours l’adapter pour 30 ou 45 minutes, qui sera le temps maximum. 

Pour progresser en apnée, il faut pouvoir s’entraîner en tout cas 3x par semaine. Dans l’eau, évidemment, mais également à sec, par exemple avec des exercices de cardio, du gainage, mais aussi plus de douceur, avec du yoga, pilates, etc. Si vous arrivez à placer 2 marches en apnée par semaine, ça sera déjà bien!

Conseil

Trouvez un temps qui vous convient en fonction de votre environnement. En ce qui me concerne, j’ai calé ma table co2 sur une balade ou, arrivé au village voisin, j’arrive au milieu de ma table et donc je fais demi tour. Je finirai donc la table de retour chez moi, pile à l’endroit ou je l’ai commencée. Mais vous pouvez très bien tourner dans l’herbe autour d’un terrain de foot à pieds nus. Trouvez ce qui vous convient!

Préparation et matériel

Pour cet exercice, j’ai assez rapidement découvert que la technologie qui nous entoure sera un atout considérable pour avoir à éviter de « suivre, calculer, compter, chronométrer, surveiller » qui sont des paramètres parasites. Il faut automatiser le processus à son maximum, et n’avoir à se soucier de rien d’autre que des sensations et de la ventilation.

un smartphone et une app 

Pour commencer, je précise que l’app que je recommande ici tourne sous Android:

Complex timer:
https://play.google.com/store/apps/details?id=com.deslomator.complextimer&hl=en

Des alternatives existent pour iOS, mais malheureusement, je ne peux pas vous faire de recommandation fiable: il faudra tester les principes que j’évoque ci-dessous.

Trouvez l’app « complex timer » qui est une app pour sportifs qui permet de configurer des entraînements à intervalles. Elle est gratuite.

Des écouteurs

Complex timer à une option essentielle, elle permet de vous « dire » à quel moment vous allez respirer, et à quel moment vous allez partir en apnée, avec une jolie petite voix robotique. Ceci va vous permettre d’automatiser totalement cet exercice, qui est l’une des clés de la réussite pour se rapprocher du flow-state. Vous pouvez ainsi lancer la table, et garder votre téléphone dans votre poche. La voix vous guide, et c’est tout.

Astuces

Dans complex timer, cochez l’option « Kepp screen on » ce qui évitera votre téléphone de partir en veille.

L’autre option essentielle est le « text-to-speech » pour vous permettre d’avoir les instructions directement dans l’oreille.  

Musique (spotify, etc)

En bonus, si vous utilisez spotify, vous pourrez mettre un bon « binaural beats » dans vos oreilles en même temps que l’exercice se déroule. Ces beats permettent – en tout cas pour moi, d’augmenter mon flow state pour me couper encore plus de l’environnement extérieur. Prenez donc garde à réaliser cet exercice sur un chemin ou les voitures et velos ne risquent pas de vous percuter, car une fois lancés, il serait dommage de devoir s’arrêter.

Un pince-nez?

La, il y a deux écoles. Certains utilisent le pince-nez pour éviter de devoir bloquer le palais mou de manière consciente, et de ce fait augmenter sa relaxation. D’autres pensent que le bénéfice ci-dessus disparait au moment de la respiration de relaxation, en empêchant l’air d’arriver par les narines.

A vous d’explorer ce qui vous convient le mieux, en fonction de votre ressenti.

Configuration de la table

Principe de la pyramide

L’idée est de travailler le co2, et donc produire le maximum de répétitions dans la zone « dure ». On va donc commencer la table tranquillement, histoire de se mettre dans l’exercice puis celui-ci va devenir plus compliqué, avec plus de répétitions. Au plus dur, vous aurez une phrase de 4-5 minutes de travail intense (le sommet de la pyramide), avant de « redescendre vers une zone plus facile.

Définition du temps idéal

A la manière d’un apnéiste qui s’aventure en profondeur pour la première fois et qui investit un peu de temps pour faire son lestage, vous allez faire pareil mais pour définir le temps qui vous convient, afin d’avoir une table adaptée dès le début de l’exercice.

Déroulement

Munissez vous simplement d’un chronomètre puis allez marcher, de préférence à l’extérieur sur l’herbe, ou en tout cas pas dans un environnement dangereux. Si vous n’avez jamais fait de marches en apnée, il faut commencer gentiment et voir comment votre corps réagit, puis augmenter la dose avec le temps.

Bien, lancez un petit rythme de marche puis, après quelques instants, faites une bonne inspiration, suivie d’une expiration passive. Attention à ne pas confondre ça avec une expiration forcée, qui aurait pour but de vous vider de votre air et de créér les conditions parfaites pour un étourdissement ou une perte d’équilibre, ce qui n’est pas le but. Une expi passive, c’est charger de l’air, et de laisser ensuite l’air s’échapper. On ne touche pas au VR. Relevez le temps sur votre chrono, puis ventilez correctement. Donnez-vous 30 secondes, puis répétez l’exercice jusqu’à ce que vous ayez suffisamment de ressenti pour définir votre temps d’apnée. Celui-ci doit déjà entrouvrir la porte de l’inconfortable. Rester dans votre zone de confort n’a jamais fait de vous un meilleur apnéiste.

Maintenant vous avez défini votre temps, il s’agit de réaliser la table co2 correspondante. Et c’est la ou vous allez faire des choix qui correspondent à votre profil d’apnéiste. Le principe de base est de créér une table en « pyramide », ou le début et la fin de la table sont plus ou moins faciles, alors qu’en son milieu, elle va vous secouer.

Configuration de la table

Je vous donne, à titre d’exemple, ma table co2. J’ai défini des expirations passives de 15 secondes, et j’aime commencer tranquillement avec 25 secondes de récupération. Le temps pour le système de se mettre en place, à son rythme. 

En son centre, cette table à 8 répétitions avec « 1 inspiration », ce qui est la partie qui va mobilier tout votre mental.

Astuce

Vous verrez assez rapidement que si vous faites des expiration passives « généreuses », cela va impacter rapidement vos sensations et vous mettre rapidement dans le rouge. Préférez jouer avec les volumes d’air à l’expiration, plutot que de changer à chaque fois votre table et vos temps d’apnées. Expirez peut être 10% de moins, pour trouver le juste milieu! C’est aussi une très belle manière d’explorer les sensations.

  • table facile

    Expiration passive, apnées de 5 secondes. Table en "pyramide".

    Repetition Apnée Récupération
    30"
    2x 5" 25"
    4x 5" 20"
    5x 5" 15"
    6x 5" 10"
    8x 5" 5" / 1 inspi
    6x 5" 10"
    5x 5" 15"
    4x 5" 20"
    2x 5" 25"

  • table moyenne

    Expiration passive, apnées de 10 secondes. Table en "pyramide".

    Repetition Apnée Récupération
    30"
    2x 10" 25"
    4x 10" 20"
    5x 10" 15"
    6x 10" 10"
    8x 10" 5" / 1 inspi
    6x 10" 10"
    5x 10" 15"
    4x 10" 20"
    2x 10" 25"

  • table difficile
    Repetition Apnée Récupération
    30"
    2x 15" 25"
    4x 15" 20"
    5x 15" 15"
    6x 15" 10"
    8x 15" 5" / 1 inspi
    6x 15" 10"
    5x 15" 15"
    4x 15" 20"
    2x 15" 25"

Evolution et optimisations

Si vous avez terminé la marche sans trop de problèmes, en ayant pu compléter chaque répétitions, alors la table est peut-être un peu trop facile pour vous. Une bonne table serait une table qu’on peut « juste » finir, mais il faudrait quand même finir sur un succès pour garder la motivation vivante pour les prochaines sessions

10% d’expiration supplémentaire

Quand vous aurez pratiqué cet exercice quelques fois, vous pourrez avoir la sensation que le chemin du retour est trop facile. C’est la réalité, puisque vous redescendez la pyramide.

Pour éviter cette sensation de ne plus avoir l’impression de travailler votre co2, une simple optimisation est de se dire « je lâche 10% de plus d’air ». Ce petit plus d’expiration va vous ramener dans la zone de travail, je veux dire, la zone d’inconfort qu’il faut aller chercher.

Variation « Uddiyana Bandha »

Quand vous aurez réalisé l’exercice ci-dessus plusieurs fois, vous commencerez à isoler quelques possibilités d’optimisation. La table est clairement plus facile sur le chemin du retour, et c’est la qu’on peut amener de nouvelles choses, par exemple Uddiyana Banda.

Si vous n’êtes pas familier avec cet terme, vous pouvez passer au point suivant. Cela nécessite de le pratiquer d’abord régulièrement, au calme, avant de l’introduire en marchant.

La meilleure progression que l’on apporter à une marche en apnée, c’est d’introduire Uddiyana Bandha dès le chemin du retour. Si vous faites vos marches en public, n’oubliez pas que le ridicule ne tue pas et qu’au pire, vous passerez pour un illuminé, ce que vous êtes, et vous assumez 😉

Le déroulement est le même: une bonne inspiration, suivi d’un expiration passive, puis uddiyana bandha sur le temps d’apnée. Tête vers le haut, et tirez la langue en marchant. Ainsi, vous travaillerez votre tolérance co2 en volume résiduel. 

Attention

Amener Uddiyana Bandha, c’est créér des différences de pression encore plus fortes que juste l’expiration passive. Lever la tête, c’est amplifier les sensations. Tirer la langue dehors, c’est aller encore plus loin. Il faut donc explorer, tranquillement, comment votre corps réagit à tout cela. Arrêtez immédiatement si vous ressentez des fourmillements, un étourdissement ou une perte d’équilibre, et revenez à la table normale.

A la recherche du flow state

Pour conclure, je trouve qu’une chose essentielle dans cet exercice est de pouvoir de se rapprocher au plus possible d’un « flow-state », à savoir un état de conscience secondaire qui survient quand tous les autres paramètres sont devenus des automatismes, pour vous permettre de réaliser l’exercice en ne mobilisant que 2 choses: votre mental, et votre souffle.

Même le fait de marcher, qui fait même le titre de cet exercice, va devenir quelque chose de secondaire, qui se fait tout seul. On avance, tel le marathonien à son 30ème kilomètre, en mode « pilote automatique ».

Une fois en chemin, votre focus se devra d’être entièrement tourné à l’intérieur de vous-même. Vous devrez faire abstraction de l’ensemble de vos sens et votre mental sera dirigé à 100% sur votre respiration consciente, pour vivre l’instant présent à fond.

Pratiquez souvent!